I.Slimani : un fennec à la relance sur le Rocher

I.Slimani : un fennec à la relance sur le Rocher

7 septembre 2019 10 Par Franck C

En recrutant Islam Slimani il y a quelques jours, l’ASM a fait le pari de relancer un attaquant axial de bon calibre international mais cependant dans le doute depuis deux saisons. Qualifié de “battant qui ne lâche rien sur le terrain”, le récent vainqueur de la CAN 2019 arrive sur le Rocher avec un esprit revanchard et une détermination certaine. Un peu à la surprise générale, l’international algérien a d’ailleurs déjà scoré à 3 reprises en deux matchs lors des 3ème et 4ème journée de Ligue 1. Son duo en attaque avec W.Ben Yedder s’annonce également prometteur. Focus sur le 13ème joueur algérien de l’histoire de l’AS Monaco.

 

Un pur attaquant axial révélé sur le tard en Europe

A 10 ans, Slimani commence à jouer au football au sein du club algérois d’Aïn Benian (banlieue ouest d’Alger) et y restera 7 ans avant de partir au club de la JSM Cheraga, autre club populaire d’Alger. Avec ce club, il connaîtra à 18 ans ses premières titularisations en D3 puis D2 algérienne.

Acheté en 2009 par le club algérien du CR Belouizdad, Slimani se révélera ensuite au grand public algérien en inscrivant huit buts lors de sa première saison. Il récidive lors des deux autres saisons avec un total de 20 buts. Grand et athlétique, le joueur ne passe déjà pas inaperçu. Slimani est un attaquant qui pèse sur les défenses et qui impose souvent son gabarit. Son excellent jeu de tête fait déjà de lui un remiseur de qualité et un pivot intéressant.

Pris en main par Miguel Angel Gamondi (NB : ce technicien argentin a entraîné en Algérie et est connu pour dénicher des joueurs talentueux en Afrique et surtout au Maghreb) alors entraîneur du CR Belouizdad en 2013, Slimani prend peu à peu une autre dimension et se voit décerner le Ballon d’Or en Algérie cette même année. Libéré de sa dernière année de contrat au CR Belouizdad, certains clubs européens se pressent pour enrôler le joueur. Le FC Nantes se positionne alors sur le joueur mais le club dirigé par W.Kita se fait « coiffer sur le poteau » par le Sporting Lisbonne qui a tout simplement offert à l’Algérien de meilleures conditions salariales.

Inconnu ou presque en débarquant au Portugal, Slimani se met dans la poche les supporters et socios du Sporting Lisbonne en peu de temps. Pour sa première saison en 2013-2014, Slimani inscrit 8 buts et 4 passes décisives, pour 26 matches de Liga Sagres. Le joueur, désiré par le nouvel entraîneur du Sporting, un certain Leonardo Jardim, confirme ensuite la saison suivante en inscrivant 15 buts et 5 passes décisives toutes compétitions confondues. L’Algérien découvre aussi pour la première fois la Ligue des Champions puis l’Europa League et son palmarès s’étoffe avec une Coupe et une Supercoupe du Portugal. La saison 2015-16 va être ensuite celle de tous les exploits à Lisbonne. Il inscrit 27 buts en 33 apparitions en championnat puis dépasse en avril 2016 la barre des 50 buts marqués pour le Sporting. La riche et puissante Premier League anglaise lui fait alors les yeux doux et de grands clubs frappent à la porte du joueur et de son agent (M.City, Tottenham, Arsenal, Leicester). C’est le club entraîné par C.Ranieri qui remporte finalement la mise et Slimani s’envole ainsi à Leicester dont l’objectif est de l’associer sur le terrain à son ami et milieu de terrain R.Mahrez. Mais malheureusement, la donne change pour l’attaquant algérien. En 46 matchs avec Leicester toutes compétitions confondues, il n’inscrit que 13 buts et délivre 7 passes décisives. Son statut d’attaquant vedette lui met une pression supplémentaire. L’Algérien a aussi mis plus de temps à se fondre dans un système de jeu différent de ceux qu’il avait connus jusqu’à présent. Slimani a aussi découvert un environnement plus physique qu’au Portugal et très différent sur le plan tactique. “J’étais habitué à jouer seul en pointe tout au long de ma carrière, mais ici, on joue à deux devant. Il faut aussi contribuer au travail défensif. Je dois m’y habituer », a indiqué Slimani qui a dû aussi composer avec l’attaquant vedette de Leicester, l’anglais Jamie Vardy. Le limogeage de Ranieri en février 2017 sonne ensuite le glas de son statut d’attaquant vedette au sein des Foxes. Shakespeare, ex adjoint de Ranieri, puis C.Puel font moins confiance à l’Algérien et celui-ci est ensuite prêté au mercato hivernal 2018 à Newcastle. De retour de ce prêt pendant lequel il a été longtemps blessé, un second prêt le fait partir en Turquie à Fenerbahce jusqu’en juin dernier.

Issu d’un milieu social modeste, le joueur a toujours montré sa détermination à se surpasser avec les clubs où il a évolué. Récemment mis à l’honneur par le club du CR Belouizdad pour la célébration de la CAN 2019, Slimani a toujours gardé un lien fort avec l’Algérie et sa capitale. Sa mentalité de joueur « qui ne lâche rien » et « qui ne triche jamais » a toujours été salué par ses différents entraîneurs. Le joueur a tenu aussi à rappeler récemment dans une interview donnée en 2018 à un média algérien le niveau d’exigence du football européen pour les joueurs d’Afrique du Nord :

Quelle est l’explication à ta hargne quand tu joues et qu’est ce qui te motive ?

(Slimani) : « J’ai toujours envie de prouver (…) et quand on vient d’Algérie il faut prouver plus que les autres, c’est ça le problème. Il y a des joueurs au pays qui ont le mérite d’être sortis pour jouer en Europe comme moi, Soudani, Halliche, Belkalem et beaucoup d’autres qui ont eu le mérite de sortir. Les gens pensent que c’est facile de quitter le pays pour aller en Europe mais ce n’est pas le cas, pour y arriver il faut travailler, avoir beaucoup de confiance en soi, c’est un peu pour ça que j’ai cette rage de jouer, c’est par rapport à tout ce qu’on subit en Algérie. C’est aussi ma façon de jouer mais c’est aussi parce qu’il faut être trois fois meilleur que les autres pour être à la hauteur aux yeux de certains. »

(source: interview DZ Foot, août 2018)

Un avenir international en pointillé ?

Avec 64 sélections depuis 2012, l’attaquant algérien fait partie « des tauliers » des Fennecs algériens. Révélé par V. Halilhodzic, sélectionneur de 2012 à 2014, le joueur est un cadre des « Verts » d’Algérie comme les surnomme les médias africains. Le départ de « Coach Vahid » et les changements de sélectionneurs ont quelque peu déstabilisé le groupe habituel de sélectionnés algériens qui vivait bien avec l’ex-entraîneur du FC Nantes. Sélectionné « sur le fil du rasoir » à la dernière Coupe d’Afrique des Nations en Egypte alors que d’autres attaquants comme A.Delort (MHSC) , I.Belfodil (Hoffenheim) et Z.Naïdji (Gil Vicente) sont restés sur le « carreau » d’une sélection pour la CAN 2019, Slimani a su garder la confiance du sélectionneur des Fennecs D.Belmadi, malgré des performances très moyennes en club. Auteur du premier but de l’Algérie face à la Tanzanie (3-0) lors de la dernière CAN 2019, l’attaquant a fait taire ses détracteurs. Au passage, Slimani a rejoint Rabah Madjer au deuxième rang de l’histoire des buteurs des Fennecs (à 7 buts derrière le buteur historique des Fennecs, Abdelhafid Tasfaout qui compte 35 réalisations). Déjà meilleur buteur algérien en Coupe du Monde avec 2 réalisations, Slimani est également le troisième meilleur buteur algérien dans l’histoire de la CAN avec 4 buts, à égalité avec son coéquipier Riyad Mahrez, et Rabah Madjer.

Islam Slimani a aussi été de l’exceptionnelle épopée des Fennecs au Mondial 2014 au Brésil. Remplaçant contre la Belgique (0-1), Halilhodzic l’aligne ensuite contre la Corée du Sud (4-2, 1 but, 1 passe décisive, désigné « Homme du match ») et la Russie (1-1, 1 but, désigné « Homme du match »). Son but inscrit lors de la rencontre ouvre les portes des huitièmes de finale à l’Algérie, face à l’Allemagne. Il dispute les 120 minutes de ce match de légende (défaite 2-1). En fêtant, le 18 juin dernier, ses 31 ans et même s’il n’a que très peu joué lors de la CAN 2019, Slimani reste un joueur important et son match face à la Tanzanie peut en témoigner. Belmadi devrait logiquement compter encore sur lui dans les prochains mois. Son avenir international devrait cependant s’assombrir à moyen terme. En 2022, Slimani aura 34 ans, et il lui sera certainement difficile de conserver son statut alors que plusieurs jeunes attaquants algériens émergent ainsi que des concurrents sérieux au poste d’attaquant axial.

Le défi monégasque

Un peu en perdition sur le plan sportif depuis deux saisons de prêts successifs à Newcastle (2017-2018) puis à Fenerbahce (2018-2019) qui se sont révélés décevants (29 matchs seulement disputés en deux ans et 5 buts marqués), I.Slimani s’est vu confirmer sans surprise qu’il ne ferait pas partie de l’aventure en Premier League pour la saison 2019-2020. Brendan Rodgers a en effet fait savoir à l’attaquant algérien qu’il ne comptait pas sur lui en prévision de la saison prochaine. Dès cette annonce, peu de clubs se sont positionnés clairement sur l’attaquant algérien. Seul le club qatari d’Al Gharafa où évolue d’ailleurs deux de ses coéquipiers de la sélection A algérienne (Sofiane Hanni et Adlène Guedioura) s’est manifesté officiellement sur un transfert sec mais le prix désiré par Leicester (au moins 10 M€) a vite calmé les ardeurs du club qatari. L’international algérien s’est alors laissé convaincre en dernière minute par Leonardo Jardim, son ancien coach au Sporting Portugal (de 2013 à 2014). L’entraîneur portugais, qui avait déjà tenté de le faire venir en janvier 2018 sans succès, connait parfaitement ses qualités de finisseur mais surtout de « battant qui ne lâche rien ». Le joueur algérien a donc voulu relever un nouveau défi sportif, cette fois-ci en Ligue 1 française, championnat qu’il n’a jamais connu au passage. Son statut « d’attaquant de complément » que Jardim compte lui attribuer sera certainement scruté à la loupe par les observateurs et les supporters monégasques. Ceux-ci attendent désormais de Slimani qu’il soit plus efficace que les attaquants remplaçants qui ont été titularisés les deux dernières saisons (Sylla, Pellegri, Diakhaby, Mboula…).

Bienvenue à Islam.